...ou du moins ils vont s'y mettre.1
Echappée de la RDP à venir, voici une photo de Kellan Lutz tirée de Closer :
... et comme on ne sait pas ce qu'il lit - ni si c'est pour épater la galerie - j'ai décidé que
dans sa pile il y avait l'excellent roman de vampires Laisse-moi entrer du suédois John Ajvide Lindqvist.2
Pourquoi Kellan lirait Lindqvist ? Parce que comme vous allez le voir, il est plus que jamais
d'actualité. Et parce qu'il s'agit d'un roman de vampires de qualité, mais pas seulement. Parce que son roman est peu connu du grand public et que c'est extrêmement dommage, parce que je sais
qu'il plaira à certains d'entre vous, tout comme les adaptations cinématographiques, et parce que, comme pour Harrison, il y a de vraies perles en
matière de romans de vampires qui ne méritent pas d'être reléguées au fond des étalages pour qu'on y mette devant des séries de "romans" ultra-formatés et ultra-répétitifs qui prennent les
lecteurs pour des porte-monnaies sur pattes. Et que les lecteurs navarriens sont cultivés, ils se meublent suédois, et lisent suédois. ^^
La quatrième de couverture vous interpellera sans doute :
" - Oskar...
Cela provenait de la fenêtre. Il ouvrit les yeux et regarda dans cette direction. Il vit les
contours d'un petit visage de l'autre côté de la vitre. Il écarta ses couvertures mais avant qu'il ait eu le temps de sortir de son lit, Eli murmura :
- Attends. Reste dans ton lit. Est-ce que je peux entrer ?
Oskar chuchota :
- Oui.
- Dis que je peux entrer.
- Tu peux entrer. »
Oskar a 12 ans, il vit seul avec sa mère au coeur d'une banlieue glacée de Stockholm. Il est
martyrisé par trois adolescents de son collège.
Eli a emménagé un soir dans l'appartement voisin. Un homme l'accompagnait. Eli sort le soir,
semble ne craindre ni le froid ni la neige et exhale une odeur douceâtre et indéfinissable. "
Peu de temps après l'installation d'Eli dans la ville, un meurtre survient dans les environs. La
police enquête, en vain.
La quatrième de couverture permet de comprendre le titre du roman, et il y a d'ailleurs une scène
mémorable où un vampire se rend dans une maison sans y avoir été invité. C'est une première, personne n'avait jamais décrit ce qui se passe, avant Lindqvist (à
ce sujet, voir l'interview en lien en fin d'article). On peut ainsi compléter, enrichir, notre vision du vampire. Car si le schéma classique du vampire est respecté, en même
temps on est loin de l'image sulfureuse du croqueur de gorges dépourvu d'âme. Au contraire.
Bien que les héros soient - en apparence, dans le cas d'Eli - adolescents, ce
n'est pas un roman pour adolescents. Les thèmes abordés sont durs (alcoolisme, violences, drogue, pédophilie, abandon, suicide, ...) mais l'auteur n'en fait pas des tonnes, rien n'est
gratuit.
Comme Bella, Oskar se sent enfin compris. Comme Edward, Eli a du mal à supporter sa condition. Il neige tout le temps (on est en Suède) comme il
pleuvrait à Forks. Mais la comparaison s'arrête là. Stephenie Meyer n'ancre pas son propos sur ce rejet de la nature vampirique ; elle le fait certes, mais très
peu. A moins qu'elle ne reprenne Midnight Sun, elle n'a pas la 'place' pour une introspection sérieuse d'Edward, à part de temps en temps sortir "ah j'ai pas d'âme, je veux
pas que tu perdes ton âme Bella" dans le premier tome, partir pour ne pas qu'elle "finisse comme lui" dans le second, rien n'est approfondi, analysé, elle ne va pas chercher dans les
tréfonds de l'âme, justement, de son héros, ce côté sombre qui pourrait le définir (sinon il ne serait pas si heureux en famille, s'auto-détruirait, etc). Rosalie souffre de ne pas pouvoir
avoir d'enfant mais elle ne rejette pas sa nouvelle vie finalement, sinon elle aurait fait des choix plus radicaux. Edward apprend qu'il a le droit de vivre aussi. Les autres
Cullen sont satisfaits de leur sort. Lindqvist lui propose des héros en souffrance, qui subissent réellement les conséquences de leurs choix, leurs destins. Ils ne sont pas hors du
monde, isolés, mais bien ancrés dans une société cruelle et glauque qui les exclut. Parce que - selon moi - pour être exclu il faut avoir fait partie du monde, avoir au moins tenté d'en être.
Oskar et Eli ne peuvent s'intégrer parce qu'ils sont des marginaux parmi les marginaux.
A noter que le roman a été adapté par un réalisateur suédois à partir du scénario de Lindqvist même. Le film,
Morse, est sorti en 2009 et a obtenu plusieurs prix prestigieux. Il est tout simplement génial.
Avant même que le film sorte en salles, un remake américain était prévu - ce qui ne doit pas vous étonner, la bonne idée inédite étant devenue une denrée rare à Hollywood -, et d'après les critiques, il s'annonce plutôt bien même s'il ne
serait pas à la hauteur de Morse. Intitulé Laisse-moi entrer, il s'agirait d'une réinterprétation plutôt que d'un remake. Et, comme par hasard, il
sort...aujourd'hui sur les écrans de France et surtout de Navarre !
Une autre raison de dévorer le livre avant d'y aller ;-)
Quelques liens :
Interview de Lindqvist
Laisse-moi entrer (critique du roman)
Morse
Laisse-moi
entrer / Morse (critique du roman et du film)
Laisse-moi entrer (critique du film)
1 Note pour les amateurs de raccourcis qui ne vont lire que le titre et un peu le corps de l'article
en diagonale juste pour dire et de facto comprendre ce qu'ils veulent, non ce n'est pas une breaking news, et non je n'ai pas la preuve irréfutable défendable devant l'onu que
Kellan Lutz lit ou a lu Lindqvist, c'est de l'humour.
2 Kellan, je te déconseille de me contredire ! ^^ si Lindqvist ne fait pas
partie des 15 bouquins que tu tiens dans les mains, retourne à la librairie de suite, et achète-le, c'est un ordre !
..